mercredi 30 mai 2012

Les échecs se jouent sur 64 cases et, à la fin, ce sont les indiens qui gagnent

Il le sait, l'aboutissement d'une vie s'est refusée à lui, pour quelques poignées de secondes qu'il n'a su amadouer par sa maîtrise. Ce départage, empli de tension traîtresse, de malchance et de cruauté aura finalement puni le challenger Boris Gelfand dans sa quête d'une gloire légendaire qu'il aura frôlé, au terme d'un combat que la bravoure n'a jamais déserté, à celui que tous, et moi le premier, avaient condamné à la damnation aux mains du géant indien lui faisant face. Le colosse s'est affaissé. Une fois en parties lentes. Et il s'en fallut de si peu pour que trébucher devint tomber, et partir pour l'éternité...

La première partie du départage (ô ironie passionnée que de lui octroyer un tel nom !), conforme à la physionomie précédente du match, vit une Semi-Slave à l'avantage du champion du monde, doté des noirs, profitant d'une imprécision coupable de son rival (a4 ? laissant le pion b3 en prise). Pourtant ce dernier, pitbull à l'infini, retourna la situation, manquant d'ambition au moment d'une prise de risque qui, alors, aurait pu se révéler salutaire. La pression à la pendule d'Anand n'était alors qu'embryonnaire. La gestation s'achevait.

Et dans cette seconde joute une Rossolimo vit le jour. Dans une variante fascinante, l'indien échangea promptement les dames pour obtenir une pression durable dans le milieu de jeu à matériel réduit résistant, emportant un pion par la suite. A défaut de la précision adéquate, cependant, le danger s'approcha, et la liquidation suivant apporta une finale Tour+Cavalier+Pion contre Tour+Fou. Nulle ? Las ! Gelfand, poussé au vice par le sablier du glas, ne sut défendre comme il se le devait, victime finalement d'une transposition dans une finale permettant une manœuvre triomphante classique en Tour+Pion contre Tour. Je dois avouer qu'alors je ne pensais pas l'israélien capable de survivre à la partie suivante. Et pourtant...

Une nouvelle Semi-Slave, sans simplification cette fois, et une très mauvaise gestion stratégique de la part du champion en titre. Pressant parfaitement, Gelfand aurait dû récolter les fruits de son travail, de sa carrière, à cet instant précis. Un simple échange intermédiaire et une pièce, soit la partie, lui aurait été offertes. Cette opportunité manqué le hantera sans doute longtemps. Par la suite la défense pleine de sang-froid du favori lui rapporta un demi-point salutaire avant l'ultime combat, avec les blancs. Une sinécure ? Oh non !

Entrant immédiatement dans une finale légèrement inférieure, Anand considérait sans doute un tel bastion infranchissable. L'envahisseur fut pourtant proche de triompher de l'assiégé, le contrôle des évènements lui échappant à nouveau faute de temps. L'indien demeure un fantastique joueur de rapides, peut-être le meilleur au monde, et il sut saisir sa chance de simplifier dans une nouvelle finale de Tours, nulle celle-là. Et un challenger valeureux, impressionnant de volonté, de talent, fit jour la perte d'aura d'un très grand champion du présent. Pour combien de temps encore ? Le prochain séisme lui sera certainement fatal, si tel Lasker et Fischer il ne tente pas de céder le titre par forfait...

Hier s'est achevée en grande pompe la rencontre des pays frères Ukraine et Pologne à Lublin, des rapides et blitz étant proposés, chaque joueur voyant ses couleurs inversées par rapport au tirage précédent. Les ukrainiens l'emportèrent à nouveau, de 2 points, soit moins que les 4 unités précédemment concédées par les polonais. Les scores individuels favorisent Sergey Fedorchuk, auteur de 4 points sur 5 dans les parties lentes et Anton Korobov, pour un même résultat en parties rapides. Nul doute que le premier bénéficiera de cet excellent résultat dans l'optique d'une place de remplaçant en équipe nationale. Rappelons tout de même que l'Ukraine compte Ivanchuk, Ponomariov, Moiseenko et Volokitin à plus de 2700, ceci nonobstant un Eljanov récemment encore dans le top 15 mondial. Pas facile d'être citoyen de la 2ème nation échiquéenne mondiale. Et si, peut-être, un jour, la France, dont il est résident...oubliez ce que j'allais dire.

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